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L'Association internationale d`avocats russes a soutenu l'appel: «Justice différée: les organisations d'avocats condamnent l'inaction CEDH dans les affaires concernant des des avocats en Turquie»

L'appel indique que depuis de nombreuses années, des dizaines d’avocats turcs font l’objet de poursuites à caractère politique, entachées de violations flagrantes des normes internationales relatives à un procès équitable. Ils ont été arrêtés, jugés et condamnés pour des accusations étroitement liées à l’exercice de leurs fonctions professionnelles : participation à des manifestations en faveur des droits humains, défense d’opposants politiques ou encore conseil à leurs clients sur le droit de garder le silence.

De nombreuses missions d’enquête indépendantes ont documenté des violations graves : pressions politiques sur les juges et procureurs, refus d’assurer les droits de la défense, recours à des témoins anonymes et répression d’avocats pour l’exercice de leurs devoirs professionnels. Ces constats, corroborés par les rapports d’organismes onusiens et de grandes ONG internationales, mettent en lumière une érosion systémique de l’État de droit en Turquie.

Ces violations ont également été confirmées par des organes de référence du Conseil de l’Europe. Dans son rapport officiel, l’ancienne Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a examiné en détail le procès contre l’Association progressiste des avocats (ÇHD) et a constaté que le tribunal avait « rejeté toutes les demandes d’audition de témoins à décharge ainsi que plus de 100 requêtes d’enquête… sans aucune justification » et que le simple fait « d’exercer la profession d’avocat était considéré comme une circonstance aggravante ». Plus encore, elle a relevé que les condamnations reposaient sur des éléments tels que « les personnes défendues par les avocats » ou leur « participation à divers événements légaux ». Elle en a conclu de manière catégorique que des activités professionnelles légitimes avaient été utilisées comme preuves à charge.

Publié en 2019, ce rapport constituait un avertissement clair adressé à la Cour européenne des droits de l’homme : un État membre du Conseil de l’Europe criminalisait désormais la profession d’avocat. Ce procès, vidé de toute équité, violait les principes fondamentaux de la Convention européenne des droits de l’homme. Pourtant, malgré ce constat accablant émanant d’une institution sœur, la Cour laisse depuis des années ces requêtes dans un vide procédural. Ce n’est pas un simple retard : c’est un manquement à son devoir, un signal inquiétant d’aveuglement face aux alertes de son propre système, et une trahison de la confiance des victimes qui attendaient une réaction urgente, et non des années de silence.

La crédibilité de la Cour, tout comme l’espoir de nombreuses victimes, est aujourd’hui en jeu.

Malgré des preuves accablantes de violations du droit à un procès équitable, de dénis systématiques de garanties procédurales et de poursuites à caractère politique, la Cour européenne des droits de l’homme n’a pas réagi avec la rapidité requise. Les conséquences de cette inaction sont désastreuses : nombre de ces avocats restent emprisonnés, en détention provisoire prolongée ou purgeant de lourdes peines prononcées à l’issue de procès en totale contradiction avec la Convention européenne des droits de l’homme. D’autres, comme Ebru Timtik, y ont laissé leur vie — elle est décédée en août 2020 après une grève de la faim de 238 jours pour réclamer un procès équitable.

Ce scandale est aggravé par l’inertie procédurale prolongée de la Cour dans ces affaires précises. Il est profondément alarmant que, bien que des requêtes concernant ces procès de masse aient été déposées dès avril 2021, la procédure de communication — étape essentielle obligeant le gouvernement turc à répondre aux accusations — n’ait toujours pas été engagée dans de nombreux dossiers. La première requête, datée du 29 avril 2021, portait sur la détention (préventive) ; d’autres requêtes relatives au droit à un procès équitable ont été déposées le 15 mars 2023. Ces années de blocage à la toute première étape d’examen sont injustifiables et contredisent directement les principes mêmes de la Cour en matière de célérité de la justice, surtout lorsque des droits fondamentaux sont en jeu.

Nous dénonçons avec force ce retard inacceptable de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’examen de ces affaires urgentes liées aux procès de masse contre des avocats et défenseurs des droits humains en Turquie.

La Cour a pourtant rappelé à de multiples reprises l’importance de rendre la justice sans délais, sous peine de compromettre son efficacité et sa crédibilité (Scordino c. Italie (no 1) [GC], § 224), et jugé que « de longues périodes pendant lesquelles les procédures… stagnent… » sans explication constituent une violation de l’article 6 de la Convention (Beaumartin c. France, § 33). Des retards injustifiés vident également le droit de recours individuel garanti par l’article 34 de tout effet utile.

Ce blocage ne prive pas seulement les requérants de recours effectifs : il encourage aussi les autorités turques à poursuivre la répression en toute impunité. Le silence prolongé de la Cour légitime de facto ces violations et mine la crédibilité de tout le système européen de protection des droits humains. Pour les avocats et défenseurs emprisonnés uniquement pour avoir exercé leurs fonctions, une justice différée équivaut à un déni de justice.

La Cour a le mandat et le devoir moral de fournir aux victimes de violations des droits humains des recours rapides et efficaces. Face à la persécution continue et aux abus systématiques, elle aurait dû faire de ces affaires une priorité absolue. Au lieu de cela, son inaction prolongée manifeste une indifférence inquiétante envers ceux pour qui elle constitue le dernier espoir de justice — notamment nos collègues de l’Association progressiste des avocats (ÇHD) et du Bureau populaire des avocats (HHB).

Nous appelons donc la Cour européenne des droits de l’homme à accélérer sans délai l’examen de ces affaires et à adopter, le cas échéant, des mesures provisoires. Tout manquement à cet égard équivaudrait à une complicité dans l’érosion des libertés fondamentales et créerait un précédent dangereux pour l’Europe et au-delà.

Un examen rapide et une décision sur ces requêtes sont indispensables pour restaurer la confiance envers la Cour en tant que dernier garant de l’État de droit et des libertés fondamentales en Europe. Une justice différée n’est pas une simple lenteur procédurale : elle sape la confiance envers la Cour et affaiblit tout le système européen de protection des droits humains.

La crédibilité de la Cour et l’espoir de nombreuses victimes sont suspendus à cette réponse. La justice différée est un déni de justice. La Cour européenne des droits de l’homme doit agir maintenant!

 

Les signatures suivantes ont été apposées sous la pétition :

Arab Lawyers Association, UK

Asociación Americana de Juristas

Avocats européens démocrates – European democratic lawyers (AED – EDL)

Defense Commission of the Barcelona Bar Association

European Association of Lawyers for Democracy and World Human Rights (ELDH)

Foundation Day of the Endangered Lawyer

Human Rights Legal Project – Samos

International Association of Democratic Lawyers (IADL)

International Association of Russian Advocates

Osservatorio avvocati minacciati of Unione Camere penali italiane

Progressive Lawyers’ Association (ÇHD), Turkey

Republikanischer Anwältinnen - und Anwälteverein e.V. (RAV)

Syndicat des avocates des France

Syndicat des avocats pour la Démocratie

The New York City Bar Association



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